L’anhédonie est au cœur des symptômes de la dépression. Plus particulièrement, l’anhédonie olfactive, définie comme l’incapacité à ressentir du plaisir olfactif, pourrait être en partie responsable d’une perturbation du comportement (prise alimentaire, interaction sociale, humeur) conduisant à une aggravation des symptômes dépressifs1. Au niveau neurobiologique, l’anhédonie a été associée à une activité déséquilibrée entre un striatum ventral hypoactif et un cortex préfrontal (CPF) hyperactif, suggérant un rôle clef de la dopamine. Une étude (COBRA) menée en la matière au Centre hospitalier Le Vinatier dessine des pistes cliniques porteuses d’avenir.
Les techniques de stimulation transcrânienne non invasive (NIBS), comme par exemple la stimulation magnétique trancranienne répétée (rTMS) qui permet de moduler (faciliter ou réduire) l’activité d’une région cérébrale ciblée, ont été proposées comme des traitements innovants pour diminuer les symptômes chez les patients dépressifs. Il a été montré que la stimulation du CPF pouvait, d’une part, améliorer l’anhédonie et, d’autre part, entrainer une libération de dopamine chez les patients. Par ailleurs, des études suggèrent que les effets des NIBS sont plus importants si la stimulation est réalisée sur un réseau cérébral activé lors de la réalisation d’une une tâche comportementale par exemple, plutôt qu’au repos2.
L’étude COBRA (Combining Olfactory and BRAin stimulation in treatement resistant depression) démarrée en janvier 2023 propose de combiner la rTMS ciblant le CPF avec des stimulations olfactives hédoniques. Ces dernières consistent à diffuser des odeurs agréables dans la pièce, pour activer le système dopaminergique chez des patients dépressifs afin de diminuer les symptômes de dépression. Dans un essai clinique contrôlé randomisé, 80 patients présentant un épisode dépressif sont repartis en 2 groupes et reçoivent 50 sessions de : 1- rTMS et stimulations olfactives hédoniques, ou 2- rTMS uniquement.
Nous réalisons des évaluations avant et après le traitement qui mesurent la sévérité de la dépression, l’anhédonie physique, sociale et olfactive, ainsi que la connectivité et l’activité des régions impliquées dans la physiopathologie de la dépression et du circuit de la récompense. Nous faisons l’hypothèse que la combinaison du traitement par rTMS appliquée sur le PFC gauche et des stimulations sensorielles olfactives hédoniques aura des effets cliniques plus importants que ceux observés suite au traitement par rTMS seule.
A ce jour, 11 patients sur les 80 attendus ont été recrutés, laissant entrevoir une fin de recrutement fin 2026, et la publication des résultats en 2027.
Laetitia Imbert, doctorante en neurosciences, membre de PsyR², équipe du Centre de Recherche en neurosciences de Lyon (CRNL), CH du Vinatier.
1- Brand, G., & Schaal, B. (2017). L’olfaction dans les troubles dépressifs: Intérêts et perspectives. L’Encéphale, 43(2), 176-182.
2- Silvanto, J., Muggleton, N., & Walsh, V. (2008). State-dependency in brain stimulation studies of perception and cognition. Trends in cognitive sciences, 12(12), 447-454.