La 6e Conférence nationale du handicap (CNH), le 26 avril dernier, sous l’autorité du Président de la République, a été l’occasion pour le Gouvernement de rappeler que « ce rendez-vous fonde l’acte II de notre politique. C’est un jalon sur le chemin de l’effectivité des droits fondamentaux et universels, de l’école à l’emploi, de la maison à la cité. » Des annonces concernant la création de nouvelles solutions d’accompagnements pour les adultes et les les enfants handicapés d’ici 2030 ainsi que le lancement d’une mission sur l’enfance et le handicap, n’ont pas permis de pacifier les relations, tendues, avec les associations, et notamment le collectif Handicaps qui avait choisi de boycotter la Conférence, tout comme l’Unafam (cf. encadré bas de texte) dénonçant « l’inaction du Gouvernement sur le handicap psychique « .
Rappelons que l’ambition de cette Conférence était de débattre des orientations et des moyens de la politique concernant les personnes en situation de handicap. Emmanuel Macron l’a souligné, « nous souhaitons donc que cette CNH soit celle d’un changement de paradigme, à la hauteur des enjeux sociétaux. Qu’elle trouve dans la conscience de chaque citoyen un allié véritable, fondamental, engagé. Qu’elle soit soutenue par une société concernée par le respect des droits fondamentaux de chacun, le bien vivre ensemble de tous les membres qui la constituent, et qui la font avance.«

Premier cap annoncé par le Gouvernement : l’école pour tous. En effet, l’ambition de l’école inclusive, avec un budget de 3,8 milliards d’euros, a permis d’engager la formation des futurs enseignants, le déploiement de dispositifs médico-sociaux intégrés, le recrutement de 132 000 accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH). Les résultats sont là avec plus de 430 000 élèves handicapés désormais dans les murs de l’école : une hausse de 30 % depuis 2017. L’heure est à présent à l’acte II de l’école inclusive avec une nouvelle ambition : celle de “l’École pour tous”. Pour ce faire, plusieurs engagements : assurer la responsabilité de la scolarisation de tous les enfants, garantir un accompagnement des enfants sur tous les temps de la vie, et rendre l’enseignement supérieur pleinement accessible. Sur ce dernier point, cinq universités seront accompagnées pour devenir des démonstrateurs exemplaires pour un enseignement complètement accessible, à partir d’un cahier des charges réalisé par le Conseil national consultatif des personnes handicapées.
« L’accompagnement médico-social doit se faire dans les murs de l’école. Pour cela des équipes médico-sociales seront positionnées auprès de l’Éducation nationale pour intervenir en soutien des élèves et des équipes pédagogiques. Les professionnels libéraux (ergothérapeutes, orthophonistes, etc.) pourront exercer dans les murs de l’école.«
Deuxième cap : le plein emploi. Pour le Gouvernement il s’agit d’un objectif atteignable : le taux de chômage des personnes handicapées est passé de 19 % à 13 % entre 2017 et 2022. « Notre ambition de plein emploi pour les personnes en situation de handicap est de leur garantir le droit fondamental d’accéder à un travail librement choisi. » Comment ?
En donnant la pleine responsabilité du service public de l’emploi pour l’accompagnement de tous les demandeurs d’emploi, en levant les freins à l’accès à l’emploi et en incitant à la reprise d’activité en milieu ordinaire, en rendant accessibles les formations, en faisant en sorte que tous les travailleurs en ESAT disposent des mêmes droit et en renforçant l’engagement des employeurs.
Une expérimentation sur la plateforme Pole-emploi.fr favorisera la mise en relation entre demandeurs d’emplois handicapés et employeurs engagés ».
Troisième cap : faire de l’accessibilité une priorité nationale. Aujourd’hui près de 80 % des communes et 900 000 établissements recevant du public sont engagés dans une démarche de mise en accessibilité. Cela ne suffit pas, le chantier de l’accessibilité nécessite que toutes les parties prenantes, État, collectivités, secteur privé, se mobilisent pour combler les lacunes qui jalonnent encore trop souvent les parcours des personnes. Les engagements en la matière du Gouvernement sont les suivants : faire pleinement respecter les obligations d’accessibilité et accompagner cette
transformation à hauteur de 1,5 milliard d’euros sur 5 ans, rendre les transports davantage accessibles pour mieux se déplacer au quotidien, parvenir à l’accessibilité numérique à 100 %, mettre en place une politique volontariste pour mieux circuler et accompagner la transition écologique vers la voiture électrique et proposer des logements accessibles plus simples à repérer et à aménager.
« Le secteur médico-social sera soutenu dans le déploiement des trente minutes d’activité des jeunes accompagnés.«
Quatrième cap : garantir la qualité de l’accompagnement partout et pour tous. « Ainsi, l’affirme le Gouvernement, le respect du droit à un accompagnement de qualité dès le premier âge et tout au long de la vie doit nous mobiliser pleinement pour la pleine autonomie de chacun. » Il s’agit donc de créer un service de repérage de diagnostic
et d’intervention précoce pour les enfants de 0 à 6 ans, de déployer 50 000 solutions nouvelles pour accompagner les choix de vie des personnes, de passer d’une logique de place à une logique d’offre de services coordonnés, de garantir un accompagnement par la MDPH pour comprendre ses droits et être orienté, améliorer la compensation du handicap
et réduire le reste à charge et de pouvoir communiquer pour exprimer ses choix : « une question de dignité« .
« Nous agirons aussi pour l’accès aux soins gynécologiques et la santé sexuelle : généralisation du dispositif d’allers-vers les femmes en établissements médico-sociaux « Handigynéco », formation sur la vie affective et sexuelle.«
Concernant la perspective des Jeux Olympiques et Paralympiques 2024, à Paris, le Gouvernement rappelle « qu’un travail de concertation et de dialogue avec les personnes concernées, les associations représentatives et le ministère des Sports et des Jeux olympiques et paralympiques a permis de construire une série de mesures qui amélioreront le quotidien des personnes en situation de handicap.«
Regarder la 6e Conférence nationale du Handicap, le 26 avril 2023
L'Unafam dénonce l'invisibilité totale du handicap psychique lors de cette Conférence. Et de rappeler que sans une prise en compte de l’ensemble des handicaps, aucune politique publique ne peut être à la hauteur des besoins effectifs des personnes concernées et de leur entourage. Ainsi l’Unafam et les associations du Collectif Handicaps "sont indignées du manque de concertation et de co-construction lors de la préparation de cette CNH. Ce manque d’écoute s’est traduit dans une feuille de route décevante, présentée par le président de la République, centrée sur l’accessibilité du bâti et des transports pour les personnes avec handicap moteur et/ou sensoriel. Si nous saluons les propositions faites pour une meilleure accessibilité du bâti et des transports, nous déplorons qu’elles excluent encore actuellement les problématiques quotidiennes des personnes vivant avec des troubles psychiques. Ces personnes ont été invisibilisées. L’accessibilité universelle, prenant en compte les besoins des personnes ayant des altérations des fonctions mentales, cognitives, psychiques dans les politiques d’accessibilité a été oubliée. Nos attentes d’une politique garantissant les droits des personnes et de leurs familles n’ont pas été comprises. « Le déni politique dont le handicap psychique fait l’objet témoigne bien du manquement systémique de l’État envers les personnes en situation de handicap psychique et de l’application de leurs droits » indique Marie-Jeanne Richard, Présidente de l’Unafam. En priorité, l'Unafam qui reste ouverte pour travailler, dans une approche par les droits, à l’élaboration d’un plan d’action répondant aux besoins de toutes les personnes en situation de handicap, demande : - l’instauration d’un observatoire territorial des besoins, prérequis nécessaire à un plan d’action pour le développement des réponses aux besoins pluriels de toutes les personnes en situation de handicap ; - un vrai plan d’action, cohérent, global, financé, qui soit en capacité de répondre aux besoins divers des personnes en situation de handicap psychique, tant en termes quantitatifs que qualitatifs, sur l’ensemble du territoire national, avec le développement d’une offre encore très carencée aujourd’hui. • Communiqué de presse, 27 avril 2023.
Selon le Collectif Handicaps, « malgré des mesures intéressantes, le discours du président de la République, n’arrivant souvent pas à dépasser les déclarations d’intention, déçoit par son flou et l’absence d’une programmation budgétaire pluriannuelle ».
• Dossier de presse « Conférence nationale du handicap 2023 », 26 avril 2023 (PDF)
Pour aller plus loin
Lire aussi « Handicap : synthèse en chiffres », 24 avril 2023.