A l’occasion de ses vœux aux « forces vives » de la santé le 30 janvier 2023, le ministre de la Santé et de la Prévention, François Braun, a présenté sa feuille de route pour l’année à venir, et plus généralement sa vision de l’avenir du système de santé. Tour d’horizon des « dix objectifs clés pour inventer l’avenir du système de santé ».
« 2023 marquera un tournant » et sera une année « déterminante » pour la santé des Français, et pour l’ensemble du système de santé, a indiqué F. Braun en préambule. Rappelant que la santé fait partie des priorités du Gouvernement, et suivant le cap fixé par le Président de la République, E. Macron, lors de ses vœux le 6 janvier dernier, il a décliné « dix objectifs clés pour inventer l’avenir du système de santé ».
• Garantir à tous les Français souffrant d’une affection de longue durée (ALD) un accès à un médecin traitant
F. Braun pointe que « plus de 600 000 d’entre eux sont privés d’un suivi régulier. » Sous l’égide de l’Assurance maladie, « une instance de pilotage sera installée au niveau national dans les prochaines semaines avec l’ensemble des acteurs ». Toutes les personnes concernées seront jointes « d’ici fin juin ». Parallèlement, le ministère travaillera « au développement d’équipes traitantes pluri-professionnelles, pour garantir un accompagnement de proximité autour du médecin traitant », donnant également une place aux pairs aidants.
• Redonner du temps médical et du temps soignant, en ville comme à l’hôpital
Il s’agit d’accélérer le décloisonnement du système de santé, poursuivre le renforcement des effectifs et mobiliser tous les leviers nous permettant de gagner du temps de soins, au service des patients. « Alors que la démographie médicale continuera de se dégrader ces prochaines années, nous avons là un enjeu absolument majeur : permettre aux soignants de se concentrer sur le cœur de leur métier. » Différentes mesures sont annoncées pour augmenter le nombre d’assistants médicaux et identifier, à l’hôpital « les soutiens logistiques, techniques et administratifs » à déployer au plus près des services. Il faudra aussi « renforcer l’exercice coordonné (…) et nous mobiliser pour que l’exercice isolé devienne l’exception ». A ce titre, l’Assurance maladie devra relancer rapidement les travaux autour des équipes de soins primaires et des équipes de soins spécialisés. « Cette démarche va de pair avec les dynamiques nouvelles de répartition des tâches entre professionnels de santé, notamment pour concentrer le temps médical sur ce qui fait sa plus-value », mouvement corollaire de celui qui vise à construire les équipes autour du médecin traitant.
Dans ce contexte, « la pratique avancée, les protocoles de coopération, les partages et les délégations de compétences » sont des leviers importants, qui doivent se déployer dans des organisations territoriales coordonnées.
• Permettre sur tout le territoire la continuité et la permanence des soins
Il s’agit de garantir à tous, sans exception « la possibilité d’accéder à un médecin en journée », mais aussi « le soir, les week-ends et les jours fériés ». Il relève désormais de la responsabilité collective des professionnels d’un territoire de garantir cette promesse. Les acquis réalisés sur l’appel préalable au 15 avant de se déplacer aux Urgences doivent être consolidés, ce qui passe par la sécurisation des Assistants de Régulation Médicale. « Un plan pour développer l’attractivité de ce métier et augmenter leur recrutement sera présenté d’ici la fin du premier semestre ». Pour soutenir cette organisation dans tous les territoires, « un tour de France des Services d’Accès aux Soins sera engagé d’ici la fin février ». Ce travail « identifiera en outre les moyens de consolider quelques filières spécialisées dans les SAS, comme la psychiatrie, la gériatrie ou la pédiatrie » pour mieux répondre à ces besoins spécifiques.
• Améliorer la qualité de vie à l’hôpital et stabiliser les équipes
Redonner confiance en l’avenir aux professionnels de l’hôpital est un enjeu majeur, qui passe par les rémunérations mais aussi par la voie « du renouvellement et de la diversité des pratiques », ie donner de nouvelles responsabilités et des perspectives de carrière. C’est aussi « prendre en compte la recherche d’une qualité de vie et d’un équilibre entre la vie professionnelle et la vie familiale. » D’ici l’été, une nouvelle façon d’organiser le temps de travail des soignants, pour limiter les heures supplémentaires, donner plus de stabilité aux plannings et ainsi mieux concilier vie personnelle et professionnelle, sera proposé. De maintenant à fin mars, le ministère engage une phase préparatoire (concertation avec les organisations syndicales et les fédérations et conférences), pour identifier les leviers prioritaires. « En avril, des orientations et outils seront mis au service des établissements, qui concerteront avec les équipes, en tenant compte des aspirations des services, et négocieront des accords locaux sur les évolutions des organisations. »
Un plan sera également déployé en faveur des manageurs des services, et en particulier des cadres de santé. « Nous devons continuer de renforcer le binôme chef de service / cadre de santé, par la formation mais aussi par des outils modernes d’animation des collectifs de travail », a souligné F. Braun, poursuivant « d’ici l’été, la direction de nos hôpitaux sera rénovée avec la mise en place de tandems administratifs et médicaux » chargés de mettre concrètement en place les changements.
Sur ce sujet de la qualité de vie et de l’attractivité, le ministre a souligné que la psychiatrie était une de ses priorités de l'année : « Nous devons aller plus vite sur le sujet de la psychiatrie de secteur. Nous avons là un enjeu majeur qui est de renforcer ces fondamentaux de notre service public hospitalier, en tenant compte de la pénibilité de ces professions, de leur spécificité, tout en accompagnant toutes les innovations importantes pour les patients. ».
• Former plus de soignants, et les former mieux
« L’année 2023 sera celle des infirmières et infirmiers, celle de perspectives clarifiées », a relevé F. Braun, évoquant plusieurs mesures importantes. Sans les détailler ici, indiquons qu’elles concernent la sécurisation des parcours des étudiants et la réingénierie de la formation ; l’évolution du décret d’actes du métier infirmier ; de nouvelles voies d’accès au métier ; l’augmentation du nombre d’infirmiers en pratique avancée (avec l’objectif de 5000 IPA en activité fin 2024) et la reconnaissance avant la fin 2023 de la pratiques avancée pour les infirmiers spécialisés.
• Créer un choc d’attractivité dans les territoires et faciliter le quotidien des soignants
Logement, transports, stationnement, sécurité ou encore gardes d’enfants, il s’agit « d’apporter des solutions nouvelles et innovantes » à l’échelle des territoires, pour faciliter la vie quotidienne des soignants.
• Tourner le dos à la logique comptable et revoir le financement du système de santé
« Nous allons sortir de la logique de l’offre et de la rentabilité, et mieux soutenir les enjeux de santé publique, de coopération à l’échelle des territoires, de prévention et de responsabilité vis-à-vis des populations. Notre objectif est clair : sortir du “tout T2A” », a indiqué le ministre de la Santé, en précisant que les fondements de cette évolution seront posés dès la prochaine loi de financement de la Sécurité sociale. L’équipe projet chargée de construire le modèle cible « sera installée au ministère dans les prochains jours ».
• Garantir que la santé soit accessible à tous
Alors que des améliorations ont permis d’améliorer l’accès de tous à certains soins (soins dentaires et prothèses auditives par ex.), le Ministère entend engager une « phase d’approfondissement » : il faut mieux faire connaître le service rendu, actualiser les paniers de soins pris en charge, ouvrir le périmètre à de nouveaux produits.
• Assumer collectivement une nouvelle ambition sur la prévention
Pour F. Braun, la prévention doit être « un marqueur de la refondation » du système de santé. Cela se traduira notamment par la concrétisation des rendez-vous de prévention, en particulier pour les personnes les plus éloignées de la santé. Dans ce registre, « la mission confiée à Philippe Denormandie, Alexandre Berkesse et Emilie Henry sur le sujet de la médiation en santé et les nouvelles formes de “l’aller vers” » complète cette ambition. Leurs préconisations sont attendues au cours de ce premier semestre.
• Faire de l’année 2023 une année importante pour la recherche et l’innovation
En lien avec la ministre de l’Enseignement supérieure et de la Recherche, le ministre de la Santé porte « des actions volontaristes et résolues » pour développer la recherche. Cela suppose de « questionner la place de tous les acteurs dans l’écosystème de la recherche, simplifier autant que possible les procédures, développer les levées de fonds et multiplier les financements pour accélérer tout à la fois la recherche fondamentale, la recherche clinique et la recherche translationnelle. »