Une étude met en évidence que les patients admis pour des soins sans consentement comprennent mal les informations délivrées sur la procédure judiciaire.
En psychiatrie, les soins sans consentement font partie intégrante de la pratique clinique. Pour garantir les droits fondamentaux des patients sous contrainte, la loi a mis en place une judiciarisation de la procédure, par l’intermédiaire de l’audience devant le Juge des libertés et de la détention (JLD), réalisée avant 12 jours d’hospitalisation (1). L’objectif de cette étude pilote, prospective et monocentrique, menée à l’EPSM Lille-Métropole, avec le soutien de la Fédération régionale de recherche en santé mentale des Hauts-de-France (FRSM), était d’évaluer le niveau de Compréhension des patients de l’intérêt de l’audience avec le juge des libertés et de la détention (Compaluji).
Méthodologie. Les chercheurs ont d’abord recueilli les renseignements cliniques de 46 patients hospitalisés sans leur consentement, obtenus à partir de leurs dossiers et certificats médicaux psychiatriques. Entre J8 et J10, un hétéro-questionnaire de 22 items explorant leurs connaissances (subjectives et objectives) leur a été proposé. Certains étaient formels (« Avez-vous été informé de l’audience avec le JLD ? Avez-vous reçu des explications ? Les termes utilisés étaient-ils compréhensibles ?… »), d’autres visaient à vérifier leur bonne compréhension des dispositions légales (« Pensez-vous que l’audience sert à vérifier le respect de la Loi ? Pensez-vous que vous allez être jugé pour une faute ? »). Sur 46 patients, 32 n’ont pas saisi correctement les enjeux de cette audience ni le rôle du juge, soit près de 70 % des questionnés.
Plus précisément, on constate que leur niveau de compréhension subjectif (perçu) est globalement mauvais, alors que les patients s’estiment plutôt informés. Notons que le seul critère qui impacte de façon significative une bonne compréhension objective est d’avoir reçu une explication claire sur le déroulement de l’audience (ainsi l’âge, le niveau d’études, la personne qui a délivré l’information ne garantissent pas une meilleure compréhension).
Perspective. Parcellaire à ce stade, cette étude apporte néanmoins un éclairage sur le sujet complexe de la compréhension du droit par les patients… Selon T. Martinage, psychiatre responsable de ce travail, « il serait pertinent d’élaborer des scores objectifs et validés » pour mieux connaître les points de compréhension et d’amélioration et « s’inspirer de modèles d’information élaborés à l’étranger. »
1– Loi n° 2011-803 du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l’objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.
• Évaluation du niveau de compréhension par les patients de l’audience avec le Juge des libertés et de la détention. Étude Compajuli, T. Martinage et al., Poster au Congrès français de psychiatrie, décembre 2022, disponible en téléchargement sur le site www.f2rsmpsy.fr