S’exprimant en visio-conférence au Congrès de l’Encéphale le 19 janvier, le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, a passé en revue les avancées récentes pour la psychiatrie, listant les actions engagées dans le contexte de la feuille de route puis des Assises de la santé mentale, et évoqué les perspectives 2022. Il a évoqué les problématiques actuelles, comme la crise d’attractivité sans précédent qui touche la discipline, sans faire d’annonces nouvelles. Il reconnaît que « du chemin reste à parcourir », mais estime qu’un virage « historique » a été pris. Le discours est disponible dans son intégralité sur le site du Ministère. Points clefs.
Réactions. Un virage historique « bien mal négocié »… Dans un communiqué du 25 janvier, 12 organismes* dénoncent un virage « bien mal négocié ». « Le discours du Ministre de la Santé ne peut que laisser extrêmement perplexes les professionnels de la psychiatrie, patients et proches, au regard de la très triste réalité qu’ils vivent au quotidien sur le terrain. Manifestement, la mesure de l’urgence et de la gravité de la situation de crise que connait la psychiatrie publique dans notre pays est loin d’être prise en compte alors que nos établissements sont confrontés à des départs massifs, et sans précédent de praticiens, même chevronnés, aggravant ainsi une démographie médicale déjà en pénurie et un contexte institutionnel remanié en toute hâte pour les contraintes relatives à la contention et à l’isolement. Qui plus est, les personnels soignants non médicaux ont désormais rejoint ce mouvement de départ. Les fermetures de lits, voire d’unités entières, se multiplient forçant à des restructurations particulièrement délétères pour la prise en charge des patients dans des conditions souvent intolérables.(...) Tous partagent le sentiment de ne plus pouvoir y exercer leur métier dans un tel contexte. (...) Où sont les mesures urgentes et massives de renforcement de l’attractivité tant attendues ? (…) » • Communiqué du 25 janvier 2022*
Le ministre a d’abord rappelé que la feuille de route santé mentale et psychiatrie, lancée il y a trois ans et demi par Agnès Buzyn et pilotée par le délégué ministériel Frank Bellivier s’est considérablement enrichie des mesures dédiées dans le Ségur de la santé et des 30 mesures des Assises de la santé mentale et de la psychiatrie. Certaines mesures complètent et concrétisent des actions déjà inscrites, quand d’autres ouvrent de nouveaux champs d’action. Au total, une cinquantaine d’actions-phares composent aujourd’hui cette feuille de route.
Des avancées majeures sont enregistrées pour promouvoir le bien-être mental, prévenir et repérer précocement la souffrance psychique et prévenir le suicide :
– production par Santé publique France de tableaux de bord incluant des données sur les enfants et les jeunes, et des vagues mensuelles de l’enquête CoviPrev.
– une enquête pérenne sur la santé mentale des enfants de moins de 11 ans, est en cours de mise en oeuvre en milieu scolaire.
– Au premier trimestre avec l’Éducation nationale une stratégie multisectorielle sera présentée, pour un cadre de référence partagé au déploiement de la promotion du bien-être mental et le développement des compétences psycho sociales vers les enfants et les jeunes.
– Développement du programme des Premiers Secours en Santé Mentale (universités, agents des 3 fonctions publiques, agriculteurs).
– Couverture plus large dans les départements du dipositif VigilanS de prévention de la récidive suicidaire déjà déployé dans 16 régions et 22 000 patients
Concernant le parcours de soins et à la mise à disposition d’une offre en psychiatrie accessible, diversifiée et de qualité, Olivier Véran estime que « l’effort ne s’est pas relâché. Il s’est au contraire considérablement amplifié et accéléré ».
– Isolement/contention : Olivier Véran à voulu rassurer « sur un sujet qui a suscité de fortes inquiétudes : l’isolement et de la contention en psychiatrie. La loi renforçant les outils de gestion de la crise sanitaire adopté dimanche dernier a rétabli les dispositions que le Gouvernement avait prévues dans le PLFSS 2022 pour se conformer aux décisions du Conseil Constitutionnel sur leur contrôle judiciaire. » À cette fin, des crédits pérennes supplémentaires à hauteur de 15 millions d’euros viendront abonder en 2022 le plan d’accompagnement, déjà prévu à hauteur de 15 M€ en 2021, pour permettre aux établissements de se réorganiser.
–Hausse des moyens : S’agissant plus globalement des moyens financiers consacrés à la psychiatrie, Olivier Véran a précisé qu’ils ont progressé sur 2021 de 2,4% et qu’une enveloppe de 40 millions d’euros vient d’être déléguée : 30 millions d’euros de crédits spécifiquement dédiés au renforcement de la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent et à la psychiatrie périnatale. Ils permettront de financer 87 projets pour soutenir l’offre de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent ainsi que l’offre de psychiatrie périnatale ;
Et 10 millions d’euros vont permettre de financer sur trois ans, 42 projets dans le cadre du fonds d’innovation organisationnelle en psychiatrie.
Pour 2022, face au succès de ces appels à projets et aux besoins de la psychiatrie, une nouvelle édition sera proposée : le fonds d’innovation organisationnelle en psychiatrie sera doté de 10 millions d’euros et l’appel à projet pour renforcer la psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent sera doté de 20 millions d’euros
–Des « maisons de l’enfant et de la famille » assureront dans les territoires la coordination des acteurs de la santé mentale et physique des 3-11 ans, sur le modèle des « maisons des ados ».
-Le dispositif « MonPsySanté » permettra dès le printemps prochain aux personnes ayant des troubles psychiques d’intensité légère à modérée de bénéficier de 8 séances remboursées chez un psychologue conventionné avec l’Assurance maladie.Ce nouveau dispositif vise à favoriser l’accès aux soins psychologiques et à promouvoir la coopération entre le psychologue et les médecins, notamment les psychiatres, vers qui les personnes doivent être orientées pour des troubles plus sévères.
Par ailleurs le ministre estime que « le virage du numérique reste insuffisamment exploité en santé mentale. Dans ce domaine, l’offre est bien inférieure à la demande et cette offre ne correspond pas toujours aux besoins les plus cruciaux de la population ».
(…) Lire la suite sur le site du Ministère des Solidarités et de la Santé…
* Les signataires de ce communiqué du 25 janvier sont : Association française des Unités pour Malades Difficiles (UMD), Association Nationale des Psychiatres Présidents et Vice-Présidents de Commissions Médicales d’Etablissements des Centres Hospitaliers (ANPCME), Association des Secteurs de Psychiatrie en Milieu Pénitentiaire (ASPMP), Comité d’Etudes des Formations Infirmières et des Pratiques en Psychiatrie (CEFI-Psy), Conférence nationale des Présidents de Commissions Médicales d’Etablissement de Centres Hospitaliers Spécialisés Fédération Française de la Psychiatrie (Fédépsychiatrie), Fédération Française des Psychologues et de Psychologie (FFPP), Fédération Nationale des Associations d’usagers en Psychiatrie (FNAPSY), Intersyndicale de la Défense de la Psychiatrie Publique (IDEPP), Syndicat des Psychiatres d’Exercice Public (SPEP), Syndicat des Psychiatres des Hôpitaux (SPH), Union Syndicale de la Psychiatrie (USP)