L’expertise psychiatrique pénale doit être « réformée »

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Conduite par les sénateurs Jean Sol (LR) et Jean-Yves Roux (RDSE), une mission de la commission des lois et des affaires sociales du Sénat, s’est penchée sur l’expertise psychiatrique et psychologique en matière pénale. Son rapport remis le 10 mars affirme que :"cette question ne peut plus faire l'économie d'une réforme dédiée".

Les rapporteurs suggèrent 20 propositions dont la vocation "est de donner à l'expert psychiatre ou psychologue les moyens de remplir effectivement son rôle". Pour les rapporteurs, "si toutes ne sont pas de nature législative, certaines pourront utilement nourrir les débats parlementaires que les textes à venir sur la réforme de la jsutice ne manqueront pas de susciter." En 2020, 49 148 expertises psychiatriques et 38 393 expertises psychologiques ont été menées. Mais, le nombre d’experts décroît dangereusement…

Voici les 20 propositions :

  • Proposition n° 1 : Associer davantage les experts psychologues à la réalisation des expertises post-sentencielles.
  • Proposition n° 2 : Mettre en place, au niveau national, une option de psychiatrie ou de psychologie légale intégrée à la maquette du troisième cycle d’études médicales spécialisées en psychiatrie ou du master 2 de psychologie.
  • Proposition n° 3 : Favoriser, à chaque fois qu’un expert récemment diplômé est sollicité par une juridiction, son accompagnement dans la mission d’expertise par un expert plus expérimenté.
  • Proposition n° 4 : Intégrer un professionnel non-expert dans la commission chargée d’émettre un avis sur l’admission d’un candidat à la qualité d’expert
  • Proposition n° 5 : Prévoir pour tout expert psychiatre ou psychologue inscrit sur les listes agréées une obligation déclarative de ses liens d’intérêts, laquelle pourra être consultée par les conseils des parties au moment de la désignation de l’expert
  • Proposition n° 6 : Réévaluer la tarification des actes de psychiatrie et de psychologie légale, en prêtant une attention particulière à la modulation de la rémunération en fonction de l’ampleur de l’affaire et de l’investissement requis de l’expert
  • Proposition n° 7 : Revenir sur le projet de déductibilité directe par le magistrat tarificateur des cotisations salariales sur le tarif net versé à l’expert, cette pratique étant manifestement contraire aux dispositions en vigueur
  • Proposition n° 8 : Inscrire à l’article R. 227 du code de procédure pénale le principe selon lequel le magistrat ayant engagé des frais d’expertise est chargé de leur taxation, en conservant la voie de recours ouverte au ministère public
  • Proposition n° 9 : Faciliter pour l’expert les conditions de réalisation de l’expertise lorsque cette dernière se fait en maison d’arrêt, en lui ménageant un accès de droit à la personne et en imposant que la première expertise ait lieu dans un délai maximal de deux mois après l’incarcération
  • Proposition n° 10 : Préciser le cadre de la transmission du dossier médical à l’expert, en distinguant selon le stade de la procédure : en amont de l’instruction, attribuer à l’expert la qualité de membre de l’équipe de soins et maintenir sa soumission au secret médical ; au cours de l’instruction, expliciter dans le code de procédure pénale la capacité qu’a le juge de mettre le dossier médical à la disposition de l’expert, en sa qualité d’auxiliaire de justice
  • Proposition n° 11 : Compléter l’article 717-1 du code de procédure pénale en prévoyant que le juge d’application des peines communique systématiquement les résultats des expertises pré-sentencielles et post-sentencielles aux experts chargés de l’examen des détenus ainsi qu’aux conseillers des services pénitentiaires d’insertion et de probation
  • Proposition n° 12 : Préciser les articles 63-3, 706-88 et 706-88-1 du code de procédure pénale, afin de spécifier que l’examen clinique de garde à vue ne peut se prêter à la réalisation d’expertises psychiatriques ou psychologiques requises par l’enquête ; par ailleurs, prévoir une grille tarifaire spécifique de l’examen clinique de garde à vue
  • Proposition n° 13 : Mieux encadrer la possibilité pour les parties de solliciter un complément d’expertise pénale ou une contre-expertise pénale au moment de l’ouverture de l’instruction ; prévoir une contre-expertise de droit ouverte à la partie civile dans le cas où l’enquête montrerait des éléments susceptibles d’orienter vers une irresponsabilité pénale ; supprimer la prérogative du président de la chambre d’instruction prévue à l’article 186-1 du code de procédure pénale de ne pas saisir la chambre d’un appel d’une demande de contre-expertise ; maintenir la communication obligatoire du résultat de l’ensemble des expertises à toutes les parties
  • Proposition n° 14 : Envisager de modifier le premier alinéa de l’article 122-1 du code pénal, en prévoyant que l’irresponsabilité pénale ne peut concerner que les personnes atteintes, au moment des faits, d’un trouble psychique ou neuropsychique, issu d’un état pathologique ou des effets involontairement subis d’une substance psychoactive
  • Proposition n° 15 : Préciser l’article 158 du code de procédure pénale en indiquant que, dans le cas où le juge d’instruction sollicite une expertise pour établir le discernement du commettant, cette expertise doit se concentrer sur les seules causes d’irresponsabilité ou d’atténuation de la responsabilité pénale
  • Proposition n° 16 : Sensibiliser les magistrats à privilégier l’irresponsabilité pénale lorsque l’expertise pré-sentencielle fait apparaître un trouble ou une maladie mentale avérée ; en conséquence, renforcer les mécanismes de surveillance au sein des établissements de soins psychiatriques pour ces patients
  • Proposition n° 17 : Expliciter par une circulaire interministérielle le rôle des unités hospitalières spécialement aménagées (UHSA) dans la prise en charge prioritaire des détenus atteints de troubles psychiatriques
  • Proposition n° 18 : Réexaminer la nécessité des expertises obligatoires en matière de dangerosité par la conduite d’un bilan de ces expertises ; dès à présent, clarifier, au sein du code de procédure pénale, la répartition des missions entre l’équipe chargée de l’évaluation pluridisciplinaire de dangerosité et l’expert post-sentenciel
  • Proposition n° 19 : Préparer la réforme de l’évaluation pluridisciplinaire de dangerosité du détenu, qui se substituerait à terme à l’expertise post-sentencielle, en intensifiant la formation criminologique des psychologues cliniciens contractuels auprès du centre national d’évaluation et en y assurant la présence de psychiatres
  • Proposition n° 20 : Repositionner l’intervention du médecin coordonnateur en lui attribuant, à la place de l’expert psychiatre post-sentenciel, la mission d’évaluer l’opportunité thérapeutique d’une injonction de soins et des traitements afférents ;permettre, en réécrivant l’article R. 3711-8 du code de la santé publique, que l’expert pré-sentenciel assume les fonctions de médecin coordonnateur.

• Article complet à lire sur le site de Dalloz.fr avec accès au rapport sous embargo (PDF)