Juges des tutelles et maladie d’Azheimer

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La Fondation Méderic Alzheimer présente les résultats d'une enquête réalisée pour mieux connaître les conditions concrètes de mise en œuvre des mesures de protection judiciaire auprès des malades d'Alzheimer. Plusieurs éléments questionnent la réalité du respect des droits.

La Fondation Médéric Alzheimer avait observé auparavant qu’une proportion importante de personnes atteintes de troubles cognitifs faisait l’objet d’une mesure de tutelle ou de curatelle : entre 10 et 20 % de celles vivant à domicile, et entre 30 et 40 % de celles résidant en établissement. C’est pourquoi la Fondation a souhaité mieux connaître les conditions concrètes de mise en oeuvre de ces mesures judiciaires, tout d’abord par une enquête réalisée en 2014 auprès des délégués mandataires judiciaires à la protection des majeurs, et en 2016 par une enquête menée auprès des juges des tutelles.

On y découvre que les juges ont en charge un grand nombre de mesures (3 500 par équivalent temps plein), dont plus d’un tiers concernent une personne atteinte de la maladie d’Alzheimer. Dans ce cas, les juges interrogent très souvent son entourage familial, mais plus rarement les professionnels qui l’accompagnent. Soulignons que seulement la moitié d’entre eux procède toujours, ou souvent, à une audition de la personne malade avant de rendre leur jugement, et que lorsqu’ils le font, ils essaient presque toujours de recueillir son assentiment. On constate que généralement ils anticipent l’aggravation des troubles, ce qui les conduit à privilégier la mesure de protection la plus lourde (tutelle aux biens et à la personne). Enfin, lorsque les juges sont sollicités pour statuer sur le choix du lieu de vie de la personne, ils prennent en compte non seulement les risques qu’elle encourt mais également ses souhaits.
Ces résultats font écho à plusieurs points de vigilance mis en lumière par le Défenseur des droits, dans son rapport de 2016(3) sur la protection des majeurs vulnérables. Ils rappellent l’importance du rôle du juge, rôle central et complexe, puisqu’il doit à la fois veiller à protéger les intérêts de la personne, tout en étant le garant du respect de ses libertés.

Chiffres-clés.
– Les magistrats ayant répondu à l’enquête ont en moyenne 43 ans.
– Ils consacrent 41 % de leur temps de travail à la fonction de juges des tutelles et ont en charge en moyenne 3 585 mesures par équivalent temps plein (ETP).
– Parmi ces mesures, 38 % concernent les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Les trois raisons principales qui motivent la demande d’une mesure sont la vente d’un bien que la personne ne peut faire seule (pour 61 % des juges), la difficulté pour la personne de gérer son budget (76 %) et l’entrée dans un établissement d’hébergement (62 %).
– La principale mesure de protection prononcée par les juges est la tutelle aux biens et à la personne.
– Moins de 50 % auditionnent toujours ou souvent la personne avant la mise en place de la mesure. Pour apprécier l’opportunité d’une mesure, ils interrogent assez systématiquement l’entourage familial de la personne (85 %) ; beaucoup moins les professionnels en charge de son accompagnement (21 %). Une fois la mesure prononcée, ils sont peu sollicités pour les décisions de santé, mais le sont davantage pour la vente de biens immobiliers et pour le choix du lieu de vie.