Sans domicile, de nombreuses personnes souffrant de troubles psychotiques sont en hébergement d’urgence

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Etre sans domicile fixe a des conséquences sur l'état de santé physique et psychique des personnes. Dans ce numéro du Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH n°36-37, novembre 2015) sur ce sujet, on peut lire en particulier un article sur La santé mentale et les addictions chez les personnes sans logement personnel en Île-de-France : l’enquête Samenta de 2009.

Répondant à une demande de la Préfecture de Paris et de la Mairie de Paris, les objectifs de l’étude Samenta (SAnté MENTale et Addictions chez les sans domicile franciliens) étaient, entre autres, d’estimer la prévalence des principaux troubles psychiatriques et des addictions parmi les personnes sans logement personnel en Île-de-France.

La méthodologie de l’enquête a reposé sur un sondage complexe permettant d’obtenir un échantillon aléatoire de personnes fréquentant des services d’aide. Le questionnaire était composé d’une partie sur la santé mentale et les addictions et de modules visant à décrire les trajectoires sociales et les conditions de vie. Les personnes ont été interrogées par un binôme composé d’un enquêteur professionnel et d’un psychologue clinicien. Un psychiatre a été sollicité ultérieurement selon les éléments cliniques recueillis pour identifier un possible trouble psychiatrique.

Entre février et avril 2009, 840 personnes ont participé à l’enquête. On estime qu’un tiers de cette population souffrait de troubles psychiatriques sévères, c’est-à-dire de troubles psychotiques, de troubles sévères de l’humeur ou de troubles anxieux. Cette prévalence de troubles sévères était plus élevée qu’en population générale ; elle était en particulier 10 fois plus importante pour les troubles psychotiques. La dépendance ou la consommation régulière de substances psychoactives étaient de 3 à 6 fois supérieures à celles de la population générale. Ces prévalences variaient selon le type d’hébergement (plus élevées dans les dispositifs à bas seuil) et leur nature différait selon le profil de la population (personnes accompagnées d’enfants ou non).

Ces résultats sont en faveur d’une amélioration du repérage, des soins psychiatriques et de l’hébergement chez les personnes sans logement, qui prenne en compte la diversité de cette population. Selon les chercheurs, leurs résultats  « mettent en lumière la diversité des publics sans logement personnel et l’inadéquation flagrante des conditions d’hébergement des malades quand on constate que les personnes sans domicile psychotiques, relevant d’un suivi qui devrait être particulièrement attentif, dans un environnement stabilisé, sont concentrées dans les structures d’hébergement les plus précaires et instables (hébergement d’urgence). Les expériences en cours dans le cadre du programme « Un logement d’abord » à Toulouse, Marseille, Lille et Paris devraient permettre de lutter contre ce phénomène. À en croire nos estimations, héberger et soigner les quelque 2 800 psychotiques sans domicile de la région Île-de-France, région la plus peuplée et la plus riche de France, ne devrait pas constituer un objectif politique et sanitaire inatteignable. »