Jon Banks est un psychiatre ambitieux. Quand une jeune femme, Emilie, le consulte pour dépression, il lui prescrit un nouveau médicament. Lorsque la police trouve Emilie couverte de sang, un couteau à la main, le cadavre de son mari à ses pieds, sans aucun souvenir de ce qui s’est passé, la réputation du docteur Banks est compromise… Ce sujet brûlant est celui du dernier film de Steven Soderbergh, thriller haletant et efficace servi par de grands acteurs : Jude law, Roodney Mara, C. Zeta-Jones, C. Tatum…
L'histoire du film. Il y a 10 ans, le scénariste Scott Z. Burns consacre quelques semaines à mener une enquête auprès du Bellevue Hospital, un célèbre hôpital psychiatrique de New-York. Burns, alors scénariste pour la série télévisée médicale Wonderland, rencontre l’équipe psychiatrique et observe leur travail auprès de patients malades mentaux, dont un grand nombre a un passé criminel. « Je voulais écrire un thriller noir qui emporte le public et joue avec ses nerfs, qui se déroule dans le monde de la psychopharmacologie, commente Burns. J’aime les films qui inventent des escroqueries astucieuses, situées dans un milieu que le public identifie. C’est un genre un peu délaissé, que j’ai toujours adoré. » Burns commence à concevoir le scénario d'Effets secondaires avec l’aide du Dr Sasha Bardey, à l’époque directeur adjoint du service de psychiatrie médicolégale au Bellevue Hospital. « Les réalisateurs voulaient donner une dimension très réaliste à leur scénario. Le film s’interroge : où la réalité s’efface-t-elle au profit de la maladie mentale ?, explique le médecin. Vous ne savez pas si les choses sont telles qu’elles apparaissent. En ce sens, le film à un côté hitchcockien. Avec une fin inattendue et ironique.» Burns, toujours aidé par le Dr Bardey, s’intéresse à l’usage croissant d’antidépresseurs. Des articles de journaux expliquent que les médicaments utilisés pour soigner la dépression, l’angoisse et d’autres maladies psychologiques provoquent un comportement inexplicable chez un petit nombre, mais non négligeable, de patients. Des médicaments couramment prescrits ont été accusés d’être à l’origine de crimes allant d’accident de la route ayant entraîné la mort à plusieurs agressions physiques. En Californie, un homme a été acquitté après avoir provoqué un accident de la route alors qu’il était sous l’emprise d’un somnifère très courant. Un antidépresseur prescrit à grande échelle a été impliqué dans une affaire d’enlèvement suivi de viol. Burns est aussi fasciné par plusieurs histoires concernant le mauvais comportement de médecins connus. «Il y a eu ce cas d’un psychiatre qui a tenté d’engager un de ses patients, un criminel, pour tuer sa maîtresse, raconte Burns. Quand le patient est allé tout raconter à la police, personne ne voulait le croire, car il était clairement fou. Notre histoire est différente, mais il y a tellement de rebondissements et de retournements de situations qu’on est sans cesse en train de se demander ce qui s’est réellement passé et qui dit la vérité.»
Alors qu’il est en cours d’écriture, Scott Burns fait appel à deux collaborateurs de confiance : le réalisateur oscarisé Steven Soderbergh et le producteur Lorenzo di Bonaventura. « Scott est très doué pour identifier des problèmes de société intéressants et les rendre commerciaux, dit Soderbergh. J’aime les films qui essaient de faire plusieurs choses à la fois. Comme « Contagion », « Effets secondaires » peut être décrit comme un thriller, mais ils sont tous deux empreints d’une réalité sous-jacente qui reflète le monde contemporain. Scott excelle également dans les mathématiques d’une histoire : Combien d’éléments doivent entrer en action ? Comment se servir des attentes du public ? Comment éviter les clichés ? Il est très doué pour créer une structure narrative, inventer des personnages intrigants et écrire de bons dialogues.»
Burns a d'abord prévu de réaliser lui-même Effets secondaires mais quand Steven Soderbergh offre ses services, le scénariste n’hésite pas longtemps : « Nous avions la même vision du scénario. Seul l’égo aurait pu me pousser à faire ce film moi-même, ce qui aurait été de ma part une très mauvaise décision artistique… » Le producteur Di Bonaventura accueille ce changement avec enthousiasme. « Steven donne une perspective singulière à tout ce qu’il entreprend. Il y a toujours un commentaire social dans ses films. Cette histoire est construite sur l’idée sous-jacente qu’on ne connaît pas vraiment l’effet de ces médicaments sur nous, mais notre société nous pousse à leur faire confiance. Le film laisse le spectateur libre de décider si c’est une bonne idée.»
Effets secondaires est donc un thriller doté d’une intrigue tordue à souhait, et truffé d’ambiguïté morale, de fragilité humaine. « Je pense que ce qui vous embarque dans un thriller, c’est l’humanité, explique le scénariste. Vous êtes autant trompé par votre cœur et vos perceptions que par la mécanique de l’intrigue. C’est amusant de déstabiliser les spectateurs. Mais ce que Steven et moi voulions, au-delà de ça, c’est que le public se sente directement concerné, qu’il s’interroge sur sa propre expérience. Le film a l’ambition de divertir et de provoquer une discussion. Nous espérons que le public comprenne que la prise de médicaments a une conséquence insidieuse sur nos comportements en société.»
- Effets secondaires. Un film de Steven Soderbergh. En salles.