Réduire de trois quarts la consommation d’alcool de personnes dépendantes sans trop d’effets secondaires ? Voilà un objectif que les spécialistes n’envisagent qu’en rêve. C’est pourtant ce qui vient d’être obtenu par une équipe de chercheurs de l'Inserm chez des rats dépendants, traités par une nouvelle molécule qui cible les récepteurs d’un puissant neuromodulateur présent dans le cerveau : l’adénosine.
C’est ainsi qu’ils ont identifié un récepteur à l’adénosine paraissant jouer un rôle important dans les addictions. « Ce récepteur, A2A, est une protéine très exprimée dans le circuit de la récompense qui incite et motive une personne à faire une action » explique Mickaël Naassila, co-auteur des travaux.
« De précédents essais ont déjà montré qu’en agissant sur ce récepteur, il est possible de réduire l’envie de boire d’un rongeur. Mais cette fois, nous prouvons que la stratégie est efficace chez des rats fortement dépendants à l’alcool. C’est donc une première ! » se réjouit-il.
Les chercheurs ont étudié la consommation volontaire d’alcool chez des rats rendus dépendants à l’alcool et des rats non dépendants. Pour cela les animaux étaient placés en présence de réservoirs permettant de boire de l’alcool, à condition d’activer un levier. Tous les animaux ont ensuite reçu une molécule permettant d’activer le récepteur A2A. La consommation des rats dépendants a alors chuté de 75 % et celle des animaux non dépendants de 57 % sur une période de trente minutes, sans effet indésirable majeur.
« Pour arriver à ces résultats, nous avons identifié la dose minimale efficace de molécule à administré aux rats. En quantité trop faible, elle produit l’effet inverse et incite à la consommation » explique le chercheur. « Et en cas de dose trop importante, nous risquions de déclencher des effets indésirables moteurs comme la catalepsie, l’incapacité à réaliser un mouvement volontaire ».
Les chercheurs ont donc bel et bien mis le doigt sur une cible et une molécule d’intérêt dans le traitement de l’alcoolo-dépendance, à condition bien sûr que des industriels prennent le relai pour mener des essais cliniques espère Mickaël Naassila. En attendant, d’autres molécules également prometteuses sont à l’étude. C’est par exemple le cas de la mémantine, déjà utilisée dans le traitement de la maladie d’Alzheimer, qui donne elle aussi de bons résultats chez le rat.
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