Radicalisation : des parlementaires pointent une politique de prévention peu développée dans le secteur public de santé

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La Mission d'information parlementaire sur les services publics face à la radicalisation consacre dans son rapport un chapitre au service public de santé, pointant que la politique de prévention et de détection de la radicalisation y reste « encore peu développée ».

Cette mission d’information a été créée par la Commission des Lois de l’Assemblée nationale le 2 octobre 2018. Elle s’est fixé pour double objectif de dresser un état des lieux de la radicalisation, s’agissant aussi bien du personnel que des usagers, dans les principaux services publics, et de formuler des préconisations pour en améliorer la prévention et la détection. Son objet ne consiste pas à étudier en quoi les services publics peuvent contribuer à la lutte contre la radicalisation dans la société française, mais d’examiner dans quelle mesure leurs agents, d’une part, et les citoyens qui s’adressent à eux, d’autre part, peuvent être concernés. Il est aussi de s’interroger sur les outils mis en place pour empêcher, repérer, voire sanctionner, cette radicalisation.

Dans son rapport présenté le 26 juin, les députés estiment que « les domaines de la sécurité, de la justice ou de la diplomatie » semblent largement préservés de toute radicalisation significative de leur personnel, mais pointent que « des zones d'ombres » persistent, notamment dans le secteur public de santé.

Les parlementaires rappelent que « l’implication et la mobilisation des professionnels de la santé mentale constituent l’un des axes du plan national de prévention de la radicalisation, qui prévoit :

– de renforcer la relation entre les Agences régionales de santé (ARS) et les préfectures sur l’articulation entre la santé mentale et la prévention de la radicalisation, via des conventions cadres précisant le rôle de chacun et d’encourager la généralisation des bonnes pratiques dans les territoires, notamment celles relatives à l’appui apporté par les professionnels de santé mentale. Il prévoit également de favoriser la présence de professionnels de santé ou de santé mentale aux côtés des référents de l’ARS au sein des cellules préfectorales ;

– d’actualiser les dispositions existantes relatives à l’accès et la conservation des données sensibles contenues dans l’application de gestion des personnes faisant l’objet d’une mesure de soins psychiatriques sans consentement (HOPSY). »

Au sujet du récent décret prévoyant le croisement de données entre le fichier Hopsyweb (Hospitalisations sans consentement) et le Fichier de signalements pour la prévention et la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT), la mission interrogé le secrétaire d'Etat auprès du minstre de l'Intérieur, Laurent Nunez, qui a justifié ce croisement en expliquant que « 12% des personnes inscrites au FSPRT souffrent de troubles psychlogiques » et qu'il s'agit donc selon lui de « prévenir le passage à l'acte d'une personne radicalisée présentant des troubles psychiatriques ». Sans trancher dans les polémiques, les députés estiment que ce sera à la mission d’information sur l’organisation territoriale de la psychiatrie, dont les rapporteures sont Mme Caroline Fiat et Mme Martine Wonner, « de se pencher plus précisément sur ce sujet qui excède le champ de la présente mission d’information. »

Au-delà de cette problématique, la mission relève que les ARS rencontrent des difficultés pour trouver leur place au sein du système de santé en matière de prévention de la radicalisation. Elle préconise :

– de prévoir des postes dédiés à temps plein pour les référents « radicalisation » des ARS (proposition n° 28),

– de développer la formation des personnels soignants (proposition n° 29),

– d’étendre la compétence du Service national des enquêtes administratives de sécurité (SNEAS au recrutement de ces personnels (proposition n° 30)

– et de prévoir une transmission obligatoire des signalements de radicalisation par les établissements de santé aux agences régionales de santé (proposition n° 31).

  • Rapport d'information en conclusion des travaux d’une mission d’information sur les services publics face à la radicalisation, présenté par MM. Éric Diard et Éric Poulliat, juin 2019, disponible sur le site de l'Assemblée nationale.