Parution du n°71 des Cahiers de Rhizome : Habiter, co-habiter

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«Zéro SDF dans les rues », « lutte contre l’habitat indigne », « virage ambulatoire en psychiatrie », « droit opposable au logement » : ces intentions, plus ou moins clairement inscrites dans les légalisations des États, font de l’habitat une thématique centrale des politiques publiques. Ce numéro s’inscrit d’ailleurs dans un contexte d’innovation sociale, avec notamment le développement des politiques dites de « logement d’abord » mais aussi la pérennisation et l’extension, en France, du programme « Un chez-soi d’abord ». Mais au-delà d’une conception technique, politique et organisationnelle, que signifie « habiter » ? Les contributeurs de ce numéro, qu’ils soient habitants, accompagnants, pairs, cliniciens ou enquêteurs partagent avec nous leur expérience. L’habiter se caractérise ici par le rapport entre soi, autrui et son environnement – et, s’il existe, son logement –, ainsi que par l’expérience du lieu et du lien pour chacune de ces parties. La période contemporaine et le mouvement de plus en plus marqué d’individualisation ont contribué à modifier notre rapport à l’habitat. (Savoir) habiter est devenu autant un enjeu identitaire qu’une préoccupation politique et publique et, de fait, une problématique pratique pour les intervenants sociaux ou en santé mentale qui « accompagnent au logement », marquant la diffusion de la « grammaire clinique » dans ce champ (Laval, 2014).

Le titre de ce Rhizome est tautologique. Habiter, c’est co-habiter. Autrement dit, la dimension subjective d’habiter intègre un cadre social, souvent de manière problématique pour les plus vulnérables et troublés d’entre nous. Nous n’habitons pas seuls. C’est cette tension et les points de convergence entre cette double perspective (subjective et sociale) qui nous intéresse dans ces Cahiers de Rhizome. D’une part, dans une vision psychologique « pour tout sujet, il y a un lieu à habiter » (Furtos, 2001), qu’il se situe – ou non – dans la norme. Il ne s’agit pas que de « posséder » un logement, mais d’y mettre de soi, de vivre où on habite. D’autre part, et dans une vision sociologique, il est illusoire de circonscrire la question de l’habiter du point de vue des normes en matière de cohabitation ou d’autonomie. Habiter son monde serait alors une injonction sociale, celle de trouver le monde qui nous correspond, mais aussi une épreuve qui fait de chacun d’entre nous un être particulier.

Rhizome est une revue interdisciplinaire consacrée aux problématiques à l'interstice des champs de la santé mentale et de la précarité. Les thématiques, variées, sont déterminées en fonction de problématiques pratiques, politiques et/ou cliniques. Rhizome a l'ambition de soutenir les pratiques, la décision politique de contribuer à la ocntroverse scientifique.

Les Cahiers de Rhizome n°71, Habiter, co-habiter, Orspere-Samdarra, avril 2019