« Attention, vous n’êtes pas fichés »…

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Les décrets du 2 décembre 2020,  qui ont élargi le champ de données de trois fichiers du renseignement, y intégrant notamment des éléments « relatifs aux troubles psychologiques ou psychiatriques » font réagir et de nombreux acteurs dénoncent les amalgames entre dangerosité et psychiatrie. Après le collectif d'usagers et de familles, la Fédération française de psychiatrie pointe la stigmatisation dont sont à nouveau victimes les patients dans un « pamphlet » du 10 janvier (ci-dessous).

« ATTENTION : VOUS N’ÊTES PAS FICHÉS !  »

L’autonomie et la spécificité effectives de la psychiatrie se payent donc d’un renoncement à servir autre chose qu’elle-même et à défendre autre chose qu’elle-même.
G. Lantéri-Laura, Psychiatrie et connaissance, Sciences en situation, 1991, p. 285-6.

Le ballet des fichiers sécuritaires

Si vous n’êtes pas fichés, vous devez être des citoyens sans âme ni personnalité, mais si vous avez frayé avec la psychiatrie, vous avez toutes les « chances » de jouir de l’attention du ministre de l’Intérieur. En cette fin de la merveilleuse année 2020, le locataire de la place Beauvau s’est fait un petit cadeau en publiant trois décrets le 2 décembre relatifs à la prévention des atteintes à la sécurité publique, à la gestion de l’information et prévention des atteintes à la sécurité publique, et aux enquêtes administratives liées à la sécurité publique. Les trois décrets recensent les nombreuses informations qui seront collectées concernant les individus présumés suspects. On note dans la rubrique « Activités susceptibles de porter atteinte à la sécurité publique ou à la sûreté de l’État », évidemment les éléments ou signes de radicalisation, le suivi pour radicalisation et à la ligne en dessous : les données relatives aux troubles psychologiques ou psychiatriques obtenues conformément aux dispositions législatives et règlementaires en vigueur (sans les détailler). Parmi d’autres critères intéressants, on relève le régime de protection, c’est-à-dire les personnes sous tutelle ou curatelle, ainsi que les comportements auto agressifs. Évidemment, uniquement si ceux-ci n’ont pas abouti à une malheureuse issue définitive. Un autre article du code de la sécurité intérieure (art. R.236-23) se voit gratifié d’un alinéa supplémentaire relatif aux données de santé révélant une dangerosité particulière (déjà apparue dans la loi de rétention de sûreté en 2008 : cf. plus loin).

Ces décrets du ministère de l’Intérieur ne surprennent guère puisqu’il s’agit de sa part d’un comportement récidiviste. On se souvient des réactions au décret Hospyweb et la mise en relation des personnes hospitalisées en psychiatrie sans leur consentement avec le fichier « FSPRT », soit le fichier des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste, mais dont l’intitulé exact n’est pas cité dans nos fameux décrets, mais uniquement désigné comme le « traitement automatisé de données à caractère personnel ». C’est comme pour Voldemort, il ne faut pas prononcer son nom. Même le ministère de l’Intérieur n’ose pas le prononcer. Ces trois petits derniers décrets seront pourtant mis en relation avec le fichier FSPRT…

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