Un rapport de l'Igas (Inspection générale des affaires sociales) se penche sur les hébergements non habilités de l'aide sociale à l'enfance (Ase). L'inspection ne recommande pas le recours à l'hôtel pour les cas complexes Ase-handicap et incite au développement de solutions partenariales.
Afin de connaitre avec précision l’ampleur du phénomène et d’être ainsi en mesure de prendre les décisions adéquates, le secrétaire d’Etat à l’Enfance et aux Familles, Adrien Taquet a saisi l’IGAS en janvier 2020 pour connaître la réalité d’une situation trop longtemps ignorée et mal connue : l'hébergement des mineurs de l'ASE à l'hôtel.
Les constats du rapport sont sans appel : en France, entre 7 500 et 10 000 mineurs de l'ASE sont hébergés à l'hôtel, souffrant ainsi souvent d'un déficit de suivi éducatif et d'accompagnement. Plus dramatique encore, ce type d'hébergement est parfois prolongé de nombreux mois, voire plusieurs années, ne garantissant pas des conditions de vie décentes aux enfants. L'IGAS souligne d'ailleurs la "perte de chance " qu'engendre ce type de placement pour les enfants. Le rapport souligne également que 95 % d'entre-eux sont des mineurs non accompagnés. Les 5 % restant représentent des enfants en situation dites complexes. Ce dernier point est au coeur de la stratégie de prévention et de protection de l’enfance depuis octobre 2019
Le Secrétaire d’Etat déclare : « Si plusieurs acteurs ont déjà alerté sur la place de l’hôtel, il s'agit de la première étude précise menée sur ce sujet : pour la première fois, cette insupportable réalité n'est pas éludée. J’annoncerai très prochainement des décisions pour mettre fin à cette situation qui compromet le bien-être des enfants concernés ».
Adrien Taquet s'est rendu en Moselle pour visiter ce département exemplaire qui a toujours refusé de placer des mineurs à l'hôtel, et mis en place des solutions efficaces et adaptées telles que la création de places modulables ou les appartements semi-autonome, pour garantir une qualité de prise en charge répondant aux besoins spécifiques des mineurs confiés.
RESUME DU RAPPORT/ A la suite d’une agression mortelle, survenue en décembre 2019, entre deux jeunes confiés au service départemental de l’aide sociale à l’enfance (ASE) dans un hôtel de Suresnes où ils étaient hébergés, l’IGAS a été saisie de deux missions : d’une part, une mission de contrôle du service d’ASE des Hauts-de-Seine
(cf rapport IGAS de contrôle de l’ASE 92), d’autre part une mission d’évaluation nationale portant sur les pratiques d’hébergement de mineurs protégés dans des structures non autorisées ou habilitées au titre de l’aide sociale à l’enfance.
Après investigations dans plusieurs départements, il ressort que le recours à ces hébergements dérogatoires dans le cadre de l’ASE – essentiellement des hôtels et plus marginalement des structures relevant du secteur ’jeunesse et sport’ – est à la fois bien établi et concentré sur certains types de situations pour lesquelles les dispositifs traditionnels d’accueil de l’ASE sont inadaptés : ’mineurs non accompagnés’ (MNA) et ’cas complexes’ mettant en échec les solutions d’accueil collectif habituelles.
Si le nombre total de jeunes accueillis à l’hôtel représente 5% seulement des mineurs confiés à l’ASE, il concerne près de 30% des ’mineurs non accompagnés’. Cette réalité est aussi marquée géographiquement, trois départements concentrant plus de 60% des hébergements en hôtel.
Or cette modalité de placement, qui peut parfois se prolonger durablement, apparaît peu sécurisante, associée à un accompagnement socio-éducatif très limité, avec un coût finalement élevé pour les départements.
Considérant les lourdes difficultés pratiques que susciterait l’édiction d’une interdiction immédiate de ce type d’accueil hotelier, la mission de l’IGAS recommande, à l’attention des conseils départementaux qui en ont la responsabilité :
– De le faire reculer en développant une offre alternative, dans des structures de petite taille, à forte intensité de suivi, adaptées aux profils des jeunes concernés, dont il convient aussi d’évaluer véritablement les degrés d’autonomie et besoins de soutien ;
– A titre transitoire, de l’encadrer, notamment en intégrant l’accueil hôtelier dans les schémas départementaux de protection de l’enfance (ce qui implique d’en préciser les règles d’utilisation) et en formalisant une démarche de suivi et de contrôle.
L’accueil des mineurs protégés dans des structures non autorisées ou habilitées au titre de l’aide sociale à l’enfance, A.Denieul, T.Leconte et F.Schechter (IGAS) – avec la participation de M.Cavely, stagiaire – Lire le rapport