Intégration sociale des adolescents issus des minorités : une première étude comparative entre pays

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Un groupe de recherche international vient de publier les conclusions de son enquête centrée en particulier sur la délinquance des jeunes issus des minorités, ethniques ou religieuses, de cinq pays occidentaux. À travers la délinquance, l’étude interroge l’intégration sociale des minorités et conclut que les relations aux institutions et les conditions de vie de ces jeunes alimentent des dynamiques d’intégration distinctes selon les pays. Les chercheurs du laboratoire Pacte (CNRS/Sciences Po Grenoble/Université Grenoble Alpes) et leurs collègues ont publié leurs résultats sous forme d’un livre aux éditions Springer en septembre 2018.

France, États-Unis, Allemagne, Pays-Bas, Royaume-Uni : cinq pays et cinq modèles sociaux différents, qui ont été le terrain d’une même étude portant sur l’intégration sociale des jeunes issus de minorités ethniques ou religieuses, l’enquête Understanding and preventing youth crime, ou « Comprendre et empêcher la délinquance juvénile » en français. Une équipe de chercheurs français et une douzaine de collègues des pays étudiés ont soumis quelque 10 000 adolescents âgés de 11 à 14 ans à un même questionnaire1. Les analyses des mécanismes d’intégration au niveaux micro et macro-social sont donc pour la toute première fois comparables entre ces différents pays2.

Cette étude montre que les infractions déclarées sont d’abord électroniques, 35 % des collégiens déclarant avoir recouru au téléchargement illégal dans l’année par exemple. La drogue la plus consommée par les jeunes des cinq pays est l’alcool (41 %), loin devant le cannabis (10 %). Mais les chercheurs insistent surtout sur la méconnaissance des comportements délinquants par les services de police, tous pays confondus : près de 85 % des auteurs déclarent ne pas avoir été inquiétés par la police. Chiffre qui met d’ailleurs en exergue l’importance de ces travaux, permettant un décompte plus exhaustif que les données des services de police, elles-mêmes encore difficilement comparables entre les pays.

Par la suite, les chercheurs se sont intéressés à un autre aspect : l’intégration sociale des adolescents au travers de leurs relations avec les institutions. En France par exemple, les jeunes interrogés sont moins attachés à l’école que dans les autres pays étudiés, et la police peine à gagner leur confiance contrairement aux Pays-Bas et à l’Allemagne. Néanmoins, l’attachement au système éducatif augmente en moyenne dans les cinq pays avec la religiosité des jeunes : plus ils accordent de l’importance à leur religion, plus ils en accordent à l’école. Les réponses ne montrent pas que la religion les éloigne systématiquement de l’école, au contraire. Cependant, cette relation positive observée en Allemagne, aux États-Unis et au Royaume-Uni n’est pas vérifiée en France, où l’effet de la religiosité est nul.

Les comportements délinquants des adolescents sont, en moyenne, plus fréquents chez les jeunes d’une origine étrangère extérieure à l’Union Européenne, bien que l’essentiel de cet effet « ethnique » s’explique en réalité par ce que l’on nomme les désavantages structuraux : conditions socio-économiques, quartiers dégradés, ségrégation scolaire… Ces adolescents sont aussi plus souvent victimes de mauvais traitements par leurs parents. L’équipe de recherche souligne enfin la dynamique générationnelle observée dans leur étude. L’adhésion aux normes morales du pays d’accueil augmente au fil des générations dans une famille issue d’un pays extérieur à l’UE.

 

1. Questionnaire dit de « délinquance auto-déclarée », suivant le standard ISRD (International Self-Reported Deliquency) conçu au début des années 1980.
2. L’enquête a été financée par l’Agence nationale de la recherche et le Conseil supérieur de la formation et de la recherche stratégiques.

Références :

Minority youth and social integration. Sebastian Roché & Mike Hough (Eds.) Septembre 2018, Springer. DOI : 10.1007/978-3-319-89462-1

Communiqué de presse du CNRS, 1 octobre 2018

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