Infirmier en pratique avancée : les professionnels déçus !

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Depuis la publication de l’article 119 de la loi de modernisation de notre système de santé de janvier 2016, qui a créé la pratique avancée pour les auxiliaires médicaux, les infirmières attendent les textes cadrant l’exercice d'« infirmier en pratique avancée » (IPA). De formation universitaire Master II, autonome et responsable, ce professionnel est positionné entre les médecins et les auxiliaires médicaux, pour combler un déficit dans l'offre de soins dans le contexte du vieillissement de la population, des évolutions des prises en charge, aux déserts médicaux…

Alors que s'ouvre la concertation au ministère de la Santé et des Solidarités, jeudi 8 mars, par la présentation d'un projet de décret, les associations professionnelles annoncent déjà leur déception.

Pour l'Ordre National des Infirmiers, en créant en 2016 ce nouveau statut, le Parlement avait pour ambition de « réorganiser les pratiques en définissant de nouvelles règles de partage entre professionnels de santé » afin « d’offrir de nouveaux services à la population et d’améliorer la qualité du processus de soins et ce dans un contexte d’une nécessaire structuration de l’offre de soins ambulatoire ». Mais le projet de décret d’application présenté par le Ministère de la Santé fait preuve d’une approche particulièrement restrictive et dénuée d’ambition.
Dans les nombreux pays où elle a été mise en place, la pratique avancée se caractérise, selon le Conseil International des Infirmières, par « un degré élevé d’autonomie professionnelle », « l’intégration de la recherche », « la gestion de sa propre charge de travail », « des compétences cliniques étendues et reconnues comme telles », et « des services de consultation ». Dans ce projet de décret, on ne trouve aucune mention des termes « consultation », ou encore « sciences infirmières ». L’infirmière de pratique avancée devra attendre de se voir attribuer par le médecin chacun de ses patients.

En raison du vieillissement de la population, de l’explosion des maladies chroniques et des polypathologies, de l’inégale répartition des médecins sur le territoire et donc du développement des déserts médicaux, les patients ont besoin de cette "profession intermédiaire". De nombreux rapports et travaux l’ont affirmé, l’infirmier en pratique avancée pourrait combler un déficit dans l’offre de soins, assurer des prises en charge complexes, en particulier sur la coordination en médecine de proximité et/ou entre la ville et l’hôpital évitant ainsi des réhospitalisations dramatiques et coûteuses, ainsi que des consultations de suivi, des actes de soins, des orientations et des prescriptions permettant l’adaptation des traitements et leur observance.

De son côté, la Coordination nationale infirmière (CNI) dénonce une « frilosité » et indique que les professionnels attendent « une évolution des textes, un courage politique à la hauteur des besoins de santé de nos concitoyens. »

Si la rédaction prévoit que ”dans le cadre du suivi des patients, l’infirmier exerçant en pratique avancée est habilité à conduire un entretien avec le patient, réaliser une anamnèse de sa situation, procéder à un examen clinique”… le terme ”consultation” demeure sciemment absent.
Alors que depuis quelques années la recherche clinique infirmière se développe, notamment dans le cadre des PHRIP, le texte précise que l’IPA “contribue à la production de connaissances en participant à des travaux de recherche dans le champ des sciences contribuant à l’exercice infirmier”. L’initiative de la recherche par l’infirmier est totalement obérée, la terminologie “sciences infirmières”, elle aussi, inexistante.

Restreindre l’autonomie de l’IPA se révèlera vite un frein à la réalisation des objectifs affichés. Les enjeux en termes de santé publique sont pourtant colossaux.

Dans ce projet de décret, l'article Article R4301-2 évoque les domaines d'intervention de IPA :
L’infirmier exerçant en pratique avancée participe à la prise en charge globale du patient, tout au long de son parcours de soins. Il collabore avec les professionnels œuvrant au sein de ce parcours, dont la conduite diagnostique et les choix thérapeutiques sont définis par le médecin.
L’infirmier exerçant en pratique avancée intervient dans le ou les domaines d’intervention suivants, après validation de l’option correspondante dans les conditions définies à l’article D…:
– pathologies chroniques stabilisées, notamment pour la prise en charge des personnes âgées ;
– oncologie ;
– transplantation [rénale] ;
– santé mentale et psychiatrie

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