Pour le libre choix du praticien et du secteur psychiatrique pour le patient et sa famille !

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Le 18 novembre 2014, le Comité de réflexions et de propositions pour la psychiattrie (CRPA) a été auditionné par Michel Laforcade, directeur général de l’Agence régionale de santé Aquitaine, missionné par Mme Marisol Touraine, Ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes, sur le volet santé mentale du projet de loi de santé. L'occasion pour l'association de présenter ses positions et plusieurs revendications, le CRPA se félicite avant tout de deux points essentiels et note que ce projet de loi  :

–  "va légaliser l’action de groupe en matière de santé. Cela va permettre à des requérants de demander aux juridictions compétentes, de façon plus efficace qu’actuellement, la condamnation des firmes pharmaceutiques, des vendeurs et des prescripteurs de molécules aux effets iatrogènes incontrôlables. Ce point est particulièrement important en matière de psycho-médicaments, où quantité de substances actuellement sur le marché ont des effets iatrogènes pour le moins puissants et pouvant porter atteinte à la santé des personnes soumises à ces traitements". (…)

  "introduit le tiers payant généralisé, qui est une mesure favorable pour l’accès à la santé, pour les personnes des classes sociales populaires. Nous attendons de cette généralisation du tiers payant que dans les consultations psychiatriques privées, il puisse y avoir un frein posé à certaines dérives. Nous pensons notamment aux dépassements d’honoraires excessifs, et au fait que nombre de psychiatres exerçant dans le privé, dès lors que vous les consultez pour faire un travail de psychothérapie d’inspiration psychanalytique, quittent la carte Vitale ou la feuille maladie et le cadre des tarifs conventionnés ou contractualisés, pour des honoraires de consultation libres. Cette pratique, malheureusement répandue, fait obstacle à l’accès aux cures de type psychanalytiques pour les personnes d’appartenance populaire n’ayant pas les moyens de payer de tels honoraires libres. Les patients des classes populaires sont ainsi renvoyés à l’abrutissement par des psycho-médicaments, seule modalité thérapeutique pratiquement accessible, et ne peuvent donc pas aisément accéder à des thérapies plus humaines, et plus approfondies, lesquelles sont ainsi réservées aux classes sociales aisées et aux classes moyennes". (…)

Par contre, sur l’organisation territoriale des prises en charge psychiatriques et le libre choix du praticien et du secteur psychiatrique pour le patient et sa famille, le CRPA estime qu'il y a une nécessité de garantir et de réaffirmer le libre choix pour le patient et sa famille, du praticien et de l'équipe de santé mentale publique ou privée, dans les soins libres comme dans les soins sous contrainte, et propose des amendements en ce sens.

Le CRPA prend également position sur la conception dominante actuelle des soins psychiatriques, ainsi que dans nombre de prises en charge en santé mentale : "Nous voulons faire connaître très clairement notre désaccord formel avec cette orientation qui consiste en se reposer sur le médicament, à ne faire que prescrire, mettre sous injections neuroleptiques retard, et estimer que le soin c’est cela et que cela s’arrête là. Nous affirmons que nous ne concevons pas le parcours de soins d’un patient suivi en psychiatrie pour des problèmes de santé mentale comme devant être essentiellement médicamenteux. A notre sens toutes alternatives sont possibles, et tout d’abord celle qui consiste en aider à la restauration du libre arbitre chez le patient.

Nous sommes très clairement opposés au fait que la réponse chimiothérapique soit la réponse prévalante dans les prises en charge psychiatriques. Selon nous, l’administration de psycho-médicaments ne devrait être qu’un moment de la prise en charge, et non comme on le voit trop souvent le seul et unique moyen de réponse aux patients et à leurs symptômes.(…)

Cette conception du soin et des patients est, de nos jours, malheureusement celle de la majorité des soignants en psychiatrie et en santé mentale. Elle est aussi malheureusement, celle qui prévaut dans les hiérarchies étatiques ou des organismes publics et privées décideurs sur ce terrain, comme dans la principale organisation des familles de patients. Ces décideurs en la matière conçoivent, dans leur majorité, le parcours de soins en psychiatrie, comme étant essentiellement centré sur le médicament et devant être contraint, ou sous menace de contrainte. Cette conception n’est pas digne de ce pays parmi les plus évolués du monde qu’est la France, et de notre 21e siècle.

Par ailleurs, on peut trouver problématique voire scandaleux, que dans la psychiatrie française, les psychologues jouent un rôle aussi peu important que celui qui est le leur actuellement, à telle enseigne que dans le cadre d’une prise en charge dans le dispositif de soins psychiatriques de secteur, les patients rencontrent, de nos jours, des obstacles importants pour accéder à des entretiens psychothérapeutiques.

Cela alors même que sont en place, dans le dispositif de soins psychiatriques public, toutes les facilités pour surdoser les patients de psycho-médicaments, et pour que ceux-ci déclenchent en conséquence, des affections iatrogènes en série, tout en étant aussi chronicisés que possible. Au total, ces mêmes patients font des carrières de malades à vie. Puis ensuite, au hasard de tels travaux statistiques, ou de déficits trop chroniques et trop importants des fonds publics, on vient s’étonner de ce que les coûts induits par de telles pratiques institutionnelles soient rédhibitoires pour les fonds publics et pour ceux de la sécurité sociale.

Sur ce même plan, et pour conclure, nous tenons à signaler qu’il y a tout de même, à notre connaissance, un nombre alarmant de patients qui décèdent prématurément du fait des surdosages en psycho-médicaments en établissements psychiatriques, ou en ambulatoire, et qu’en soi, un tel état de fait devrait provoquer des études sérieuses actuellement non produites, et pour cause. Ces questions sont habituellement esquivées et mises de côté.

Mais il est également vrai que la vie même d’une personne atteinte de maladie mentale n’est d’aucune importance, ou pas loin, et que les parquets classent comme morts naturelles, systématiquement ou presque, les cas de morts subites par surdosage de neuroleptiques et d’autres psycho-médicaments, distribués larga manu, dans les enceintes psychiatriques hospitalières.

La psychiatrie française ne peut pas continuer ainsi. Une réforme est nécessaire», conclut le CRPA.