Le CGLPL dénonce des atteintes aux droits des patients en psychiatrie

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Ce rapport 2013 du Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) est le dernier présenté par Jean-Marie Delarue, qui achève son mandat cette année. L’occasion de rappeler vingt mesures phares toujours attendues dont la mise en œuvre est suspendue « bien inutilement » puisqu’elles sont inéluctables en vertu des situations et des normes juridiques applicables. Si ce rapport reste globalement centré sur la détention, deux chapitres sont néanmoins consacrés aux soins psychiatriques.
– Concernant l’intervention du juge des libertés et de la détention (JDL), le CGLPL note que le juge renvoie souvent une image « répressive » et que sa dimension protectrice des droits de la personne reste méconnue, que la tenue des audiences au tribunal pose des difficultés et qu’il faut privilégier l’hôpital et que la défense des personnes admises en soins sous contraintes reste embryonnaire.
– Les droits des patients admis « en soins libres » dans des unités de soins fermés devraient être mieux protégés.
– Constatant la grande hétérogénéité des notifications de leurs droits aux patients placés sous contrainte, le Contrôleur recommande que le ministère de la Santé établisse un document-type décrivant les types d’hospitalisation sous contrainte et les voies de recours, à charge pour chaque établissement hospitalier de l’adapter aux spécificités locales en y ajoutant, notamment, les adresses des autorités compétentes.
– Il faut aussi s’interroger sur la question du consentement aux soins des personnes atteintes de troubles mentaux hospitalisées sans leur consentement et donc mieux définir la notion de « personne de confiance » : modalités de sa désignation, conditions de son intervention, rôle dans la procédure de comparution du malade devant le juge des libertés et de la détention (JLD).
– Le contrôleur relève également l’insuffisance d’activités, constante dans la plupart des hôpitaux où les patients déambulent, désœuvrés.
– S’agissant du recours à l’isolement et à la contention, le CGLPL remarque que les chambres d’isolement ne sont pas toujours équipées d’un bouton d’appel, ni d’horloge permettant au patient de se repérer dans le temps. Les malades peuvent y être entravés, sanglés à leur lit ; le moindre geste de la vie quotidienne (se nourrir, uriner) place alors la personne dans des conditions humiliantes. Il arrive que de tels placements soient décidés par des infirmiers sur le seul blanc-seing du psychiatre, matérialisé par l’indication : « placement à l’isolement si besoin ». Des personnes admises en soins libres peuvent être placées en chambre d’isolement sans que leur accord ait été préalablement recueilli dans le cadre du contrat de soins, ni que leur statut ait été ultérieurement modifié. Le CGLPL suggère que « la traçabilité des mises à l’isolement dans les soins psychiatriques soit assurée par un registre ad hoc ». Sur ce point et sur l’usage de contention, cette traçabilité doit figurer également dans le dossier médical du patient et comprendre l'heure de début et de fin de la mesure, les circonstances d'espèce, les raisons ayant motivé le recours à la mesure, le nom du médecin l'ayant prescrite ou approuvée dans un délai raisonnable.
Enfin ce rapport pose la question du droit des patients en psychiatrie au regard des principes généraux reconnus à tout patient (droit à l’information, liberté d’aller et venir, consentement aux soins, accès au dossier…), que des arguments sécuritaires ou d’organisation ne doivent pas faire perdre de vue.

  • Le contrôleur général des lieux de privation de liberté. Rapport 2013. Éd. Dalloz, mars 2014, 396 p. 19 euros. Une version gratuite sera disponible en PDF sur le site du CGLPL  : cglpl.fr