Les états doivent investir dans les infirmiers !

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Le secteur de la santé est un secteur porteur sur lequel les États doivent investir notamment dans les personnels de santé. D'ici 2030, 40 millions d'emplois devraient en effet être à pourvoir, selon le rapport de la commission de l'OMS-OCDE-OIT*. Les infirmiers y ont un rôle à jouer, ce que défend le Conseil international infirmier.

La Commission de haut niveau sur l'emploi en santé et la croissance économique* estime, dans un rapport du 20 septembre, que 40 millions de nouveaux emplois devraient être à pourvoir d'ici 2030 dans les secteurs de la santé et du social. Les pays dits à revenus faibles ou intermédiaires sont principalement visés. Pour autant, a indiqué lors d'une conférence de presse organisée par l'Ordre national des infirmiers (Oni) le 28 septembre Judith Shamian, présidente du Conseil international des infirmiers (CII), 22 millions de ces emplois concerneraient les pays dits riches. Un chiffre établi par la commission en fonction de la demande croissante des maladies chroniques, du vieillissement de la population et des pays en transition, a-t-elle expliqué. Venue présenter ce rapport auquel le CII a participé, Judith Shamian explique que la création d'emplois ne concerne pas que les professionnels de santé, mais aussi le secteur social et le personnel intervenant en soutien des systèmes de santé. Il est important d'investir dans ce secteur.

Investir dans un secteur porteur

Dans le communiqué de presse diffusé après la remise du rapport, il est indiqué que le retour sur investissement y est estimé à 9 pour 1. Par ailleurs, un quart de la croissance enregistrée entre 2000 et 2011 dans les pays à revenu faible ou intermédiaire "résulterait d'améliorations sanitaires". Ces efforts, a insisté Judith Shamian, permettront en outre à la croissance économique de se renforcer. "La santé s'affirme comme un gisement majeur d'emplois", est-il noté dans le communiqué. La présidente du CII rappelle par exemple qu'entre 2000 et 2014 beaucoup d'emplois dans les secteurs par exemple industriel ont été supprimés alors que dans la santé ils ont augmenté. En effet, dans l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), l'emploi dans la santé et des services sociaux a progressé de 48% sur cette période. Pour parvenir à atteindre ces objectifs d'ici 2030 et éviter une pénurie prévue de 18 millions de professionnels de santé, la commission a formulé dix recommandations (lire l'encadré) qui seront déclinées en plan quinquennal. Ce plan sera discuté les 15 et 16 décembre prochains à Genève (Suisse), a indiqué Judith Shamian. Ce sera ensuite à chaque pays d'établir les priorités et d'adapter les recommandations à ses besoins, par exemple sur les ressources humaines. Elle a aussi souligné l'importance d'intégrer les entreprises aux différentes discussions.

Les infirmiers de demain

Pour le CII, trois points sont importants : inclure les femmes et les jeunes ; passer d'un système fondé sur la guérison à un système agissant sur la prévention et la promotion en santé ; s'appuyer sur l'éducation de tous les professionnels de santé et la réglementation. Et sur ces sujets, l'infirmier a un rôle prépondérant, estime Judith Shamian. En ce sens, le conseil international entend mobiliser les pays autour de ce rapport, en s'assurant qu'il soit compris et en menant des études et des recherches, a-t-elle détaillé. Si elle ne souhaite pas avancer de chiffres précis en matière de besoin en infirmiers, l'évaluation étant du ressort de chaque pays, la présidente du CII estime toutefois les besoins en milliers. D'autant plus si l'une des orientations est de tendre vers la prévention, souligne-t-elle. Et d'ajouter que les zones rurales sont souvent couvertes par les infirmiers qui se retrouvent alors en première ligne auprès des patients. Judith Shamian a ajouté que les discussions sur les pratiques avancées vont en ce sens. Didier Borniche, président de l'Oni, a sur ce point indiqué que la profession d'infirmier en France "est à l'aube de mutations profondes" avec l'émergence de nouveaux métiers et de façon de prendre en charge les patients. Il espère que les travaux "vont s'engager rapidement" notamment face au développement de l'ambulatoire et aux deux défis que sont les maladies chroniques et le vieillissement de la population.

Les dix recommandations de la Commission

La Commission de haut niveau sur l'emploi en santé et la croissance économique a dans son rapport formulé dix recommandations pour "renforcer l'investissement dans les personnels de santé et le rendre plus efficace".
Elle se divise en deux parties :
– six portent sur les changements à mettre en place :

  • stimuler les investissements pour créer des emplois décents,

  • maximiser la participation économique des femmes et favoriser leur autonomisation en institutionnalisant leur leadership,

  • développer la formation initiale et continue,

  • réformer les modèles de services centrés sur les soins hospitaliers et privilégier la prévention et la fourniture efficace de soins primaires et ambulatoires,

  • exploiter le potentiel des technologies de l'information et de la communication,

  • investir dans les principales capacités du règlement sanitaire international ;

– quatre portent sur les moyens de favoriser ces changements :

  • lever des fonds suffisants auprès des sources nationales et internationales publiques et privées,

  • promouvoir la collaboration intersectorielle aux niveaux régional, national et international,

  • améliorer la reconnaissance internationale des qualifications des personnels de santé pour promouvoir un meilleur usage des compétences,

  • entreprendre des recherches et des analyses approfondies sur les marchés de l'emploi dans le domaine de la santé.

Géraldine Tribault, Hospimédia du 29 septembre 2016
 

* La Commission de haut niveau sur l'emploi en santé et la croissance économique a été mise en place en mars 2016 à l'initiative du secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies (Onu), Ban Ki-moon. Elle est présidée par François Hollande, président français et Jacob Zuma, président sud-africain, et placée sous l'égide de l'Onu, de l'Organisation mondiale de santé (OMS) et de l'Organisation internationale du travail (OIT).